Dernière mise à jour août 2020
Trois voies romaines passaient à proximité de Dinan. La voie de Corseul à Avranches passait à 3km au nord, celle de Corseul à Rennes à 3km au sud-ouest, celle de Corseul à Rieux à 8km à l'ouest. Venant de Vannes, une quatrième voie aboutissait à Corseul, à 10km de Dinan.
Dans cet article, on va s'interroger sur d'éventuelles jonctions gallo-romaines entre ces voies dans le voisinage de Dinan.
Sortant de Dinan par La Barrière, l'ancien chemin de Dinan à Broons suivait de près l'actuelle D793 jusqu'à Brusvily. Peu avant le bourg de Brusvily, l'ancien chemin de Broons suit le Chemin du pré de guien à la vieille église (cadastre de 1843 de Brusvily, section C4), ce qui nous indique que l'église primitive de Brusvily pouvait se trouver à environ à 500m au nord de l'actuelle. Vers le sud-ouest, on suit le Vieux chemin de Broons à Dinan (cadastre de 1843 de Brusvily, section C4). En arrivant sur la commune d'Yvignac, le chemin laisse à 200 à l'ouest la chapelle templière de Lannouée [1]. A 500m au sud-ouest de Lannouée, on a deux branches parallèles. La branche la plus au nord est vraisemblablement la plus ancienne. Elle est appelée Chemin des Petites croix (cadastre d'Yvignac de 1836, section A3) puis Chemin de Dinan à Trédias (cadastre d'Yvignac de 1836, section A1). La branche sud a du être créée postérieurement pour relier Dinan à Broons. Elle est très irrégulière et réutilise plusieurs sections plus anciennes.
En continuant par la branche nord on arrive à Trédias par l'Hotellerie.
Juste après Trédias, on franchit la Rosette et on arrive au prieuré-hôpital de Saint-Georges. Le marquis de l'Estourbeillon a publié la lettre de Charles de Blois du 15 décembre 1346 qui confirme la fondation :
Nous, Charles, duc de Bretagne, vicomte de Limoges, sire de Guiche et du Maine et nous, Julienne (Jehanne), duchesse de Bretagne, o l'authorité de nous, le Duc, et ladite duchesse nostre très chier compagne, donnée quant A toutes les choses qui ensuyvent, faisons savoir à tous: Que comme nostre très cher et ami baschelier, Monsour Geffroy Le Veier et dame Jeanne (Rouxel), sa femme, ayant commencé et fondé, et ayant entente et volonté de parfaire et achever en l'honneur de Dieu, nostre Créateur et de nostre Dame, la beniste et glorieuse vierge, nostre Dame et de la vraie sainte Croix et de Monsieur saint Jacques et toute la sainte compaignie de Paradis, un hospital au bout de la chaussée de Trédias en la paroisse de Tremeur, sur le Chemin des Sept Saints de Biconguy en la diocèse de Saint Malo [2, p. 307].
Une série d'actes mentionnent le prieuré Saint-Georges :
Le 15 février 1582, le même seigneur, Messire Louis d'Espinay, agissant tant pour lui que pour Messire Charles d'Espinay, marquis de Vaucouleurs, seigneur d'Yvignac, son fils, fait au couvent de Trédias une nouvelle fondation dans laquelle on le voit donner aux religieux, un grand pré nommé les Couailles du moulin de Trédias, appartenant audit seigneur à cause de sa chatellenie d'Yvignac, d'une contenance de 3 vergées, joignant d'un côté le chemin du Roy qui conduit du bourg de Trémeur au couvent de Saint-Georges [2, p. 304].
15 novembre 1470. — Acte de ratification passé entre le prieur de Saint-Georges, d'une part, et Jean du Bouays, d'autre part, d'un contrat d'échange passé entre eux, le 6 octobre précédent, par lequel ledit du Bouays avait cédé audit prieur, savoir : une pièce de terre en la paroisse de Tremeur, près de l'hôpital de Saint-Georges, contenant environ 2/3 de journal, joignant d'un bout au chemin par lequel l'on va dudit hôpital au bourg de Tremeur, appelé le Chemin des Pèlerins, chargée de 11 deniers de rente dus à Messire Olivier Le Vayer, sgr. de Tregomar, dixme et obéissance, suivant coutume. Et pour récompense ledit prieur avait baillé audit du Bouays 6 sols 8 deniers de rente dus audit prieuré par Pierre Davy, de Jugon [3].
10 juin 1482. — Traité passé entre les religieux de Saint-Georges d'une part, et Noël Quinquenel, pour et au nom de Perrine Renouvel, sa femme, et consorts, d'autre part, par lequel il fut reconnu que dès le 1er décembre 1470, ont lieu un contrat d'échange entre lesdits religieux d'une part, par lequel, lesdits religieux avaient cédé à ladite Renouvel, savoir : 6 boisseaux 1/2 de froment de rente, mesure de Plumaudan, dus auxdits religieux par Noël Chouette, sur hypothèque valable, et en retour ladite Renouvel avait cédé auxdits religieux une pièce de terre en la paroisse de Tremeur, proche de l'hôpital de Saint-Georges, contenant environ 2/3 de journal, joignant d'un côté auxdits religieux, et d'un bout au chemin qui va dudit hôpital à Tremeur, nommé le Chemin des Pèlerins, tenue prochement de N. Le Compte et sa femme à cause d'elle, sieur et dame de Penguily, à charge de 7 deniers de rente. [3].
On trouve également deux mentions du Prieuré Saint-Georges de Trédias dans l'Histoire de Bretagne publiée en 1707 par Dom Lobineau :
En parlant du voïage des Sept Saints, autrefois fameux en Bretagne, & si usité, qu il y avoit mesme un chemin pavé destiné tout exprès, appelé pour cela le chemin des Sept Saints, dont j'ai veu des vestiges aux environs de Dinan; j'ai pu hesiter sur ces Saints, & n'ai osé assurer positivement si c’estoient les premiers Evesques des anciens Sièges Bretons, en y joignant celui de Vannes; mais depuis peu un homme qui joint beaucoup de litterature à une vie tres mortifée & tres-édifiante, a écrit, sur quelques éclaircissemens que j'avois demandez en Bretagne, une lettre qui m'a esté communiquée, dans laquelle, outre l'explication de beaucoup de mots Bretons qui sont dans le Glossaire que j'ai mis à la fin du second volume, j'ai trouvé que je pouvois prononcer avec assurance que les Sept Saints n'estoient autres que ceux-là; & qu'on voit encore, dans l'Eglise de Quimper, au côté méridional de la porte du Choeur, un ancien Autel dédié aux Sept Saints, où ces Sept Evesques sont dépeints avec leurs attributs tirez de leurs principaux miracles, & leurs noms au bas, qui sont: saint Paul, saint Corentin, saint Tugdual, saint Patern, saint Samson, saint Brieuc et saint Malo. .
Ce fut à peu prés dans le mesme-tems que le Duc fut malade de la rougeolle à Rennes, & ce fut sans doute pour obtenir de Dieu la guerison de cette maladie qu'il fit veu de faire le voïage des Sept Saints de Bretagne, dont il s'acquita en la compagnie du sire de Porhoet. Ce voïage estoit une devotion si en usage autrefois, qu'il y avoit un chemin tout au travers de la Bretagne, fait expres, que l’on appelloit pour ce sujet le chemin des Sept Saints, dont on voit encore des restes au Prieuré de Saint George prés de Dinan. Ces Sept Saints estoient apparemment S. Paul de Leon, saint Tugdual, saint Samson, saint Malo, Saint Meen, saint Judicaël, & saint Corentin, ou bien c'estoient les freres & les neveux de saint Judicaël .
Ainsi, on dispose de plusieurs textes mentionnant un chemin entre Trédias et Trémeur : chaussée de Trédias en 1356, chemin des Pélerins en 1470 et 1482, puis Chemin du Roy en 1582. Vers 1707, Dom Lobineau y a vu un chemin pavé et affirme que c'était le chemin du pélerinage des Sept Saints de Bretagne qui passait par Quimper, Saint-Pol-de-Léon, Tréguier, Saint-Brieuc, Saint-Malo, Dol-de-Bretagne et Vannes.
Si on admet l'hypothèse de Dom Lobineau, le chemin menait à Vannes. En le prolongeant après Trémeur, on passe par le bourg de Sévignac. Ensuite, si on tente de rejoindre la voie romaine de Corseul à Vannes au plus court près du Grand Saint-Meleuc, on passe par Pont ès Pélerins (cadastre de Plénée-Jugon de 1837, tableau d'assemblage). On note aussi le toponyme chaussée, en fait une chaussée d'étang (cadastre de Rouillac de 1836, parcelle A1-54).
Sur la commune de Saint-Carné, la route qui mène au Hinglé est appelée Voie romaine.
Sur la commune de Trévron, le cadastre de 1843 indique le Chemin pavé (section A1) qui est orienté nord-sud. J. Gaultier du Mottay rapporte que d'après une tradition la voie pavée avait été construite par les Templiers établis à Trévron. La voie permettait de rejoindre Léhon. J. Gaultier du Mottay pensait qu'il s'agissait de la voie de Corseul à Rieux. Depuis Trévron, il la faisait rejoindre Saint-Jouan-de-l'Isle par les environs du bourg de Saint-Maden [4, pp. 104-108].
Au sud-ouest de Trévron, un chemin qui suit des limites de communes pourrait rejoindre la voie Corseul-Rieux au nord-ouest du bourg de Plumaudan.
A l'exception d'une section sinueuse au niveau de Brusvily, le chemin de Dinan à Broons a un aspect antique jusqu'à Trédias. Etait-ce une partie d'une jonction gallo-romaine entre les voies Vannes-Corseul et Corseul-Avranches ? On ne peut pas l'affirmer.
On pouvait également avoir une jonction gallo-romaine entre Dinan et Brusvily, ce qui aurait permis de relier la voie Avranches-Corseul à la voie Corseul-Rieux en évitant le détour de Corseul. Un élément de la vie de Saint-Méen peut nous faire penser que cette jonction existait, peut-être dès l'époque gallo-romaine. Vers le VIe siècle, saint Méen résidait à Dol-de-Bretagne dans le monastère de saint Samson. Un jour, ce dernier l'a envoyé en mission à Vannes. L'itinéraire suivi par saint Méen passe par Gaël et ce voyage semble être à l'origine de la fondation de Saint-Méen-le-Grand [5, pp. 138-142].
On a là la description d'un itinéraire allant de Dol-de-Bretagne à Vannes, effectué au VIe siècle et passant par Gaël. La voie gallo-romaine Avranches-Corseul pouvait être suivie jusqu'à la Rance. On pouvait peut-être rejoindre directement la voie Corseul-Rieux et la suivre jusqu'au niveau de Gaël. De là on pouvait suivre la voie Rennes-Castennec jusqu'au croisement de la voie Corseul-Vannes près de Lanouée.
Malheureusement, à ce jour, à supposer qu'une jonction ait existé à l'époque gallo-romaine gallo-romaine entre les voies d'Avranches et de Vannes, on ne peut pas la localiser. Elle suivait peut-être l'ancien chemin de Dinan à Broons jusqu'à Brusvily voire au delà. D'autres itinéraires son également possibles, soit plus au nord, soit plus au sud.
Au nord du bourg de Trélivan, le cadastre de 1843 indique un chemin qui traverse la commune d'est en ouest en passant par l'actuel aérodrome et four chaux. A l'est il continue vers Dinan par Sainte-Anne. A l'ouest il s'embranche dans la voie Corseul-Rieux au sud-ouest de la Vieuville. Sur la commune de Vilde-Guingalan, le cadastre de 1835 montre un chemin de grande largeur. De toutes les hypothèses envisagées ci-dessus pour une éventuelle jonction gallo-romaine passant par Dinan, celle-ci, d'une longueur de 11km, semble être la plus plausible. Pour franchir la Rance, elle utilise le premier passage possible au sud de Taden. A l'ouest de Dinan, elle reste sur le plateau en évitant tous les franchissements de cours d'eau.